mardi 27 février 2007

Top Navrance #3 : Nous contre Eux

En écoutant les premières mesures de notre chanson d'aujourd'hui, "les human beings", on jurerait qu'il s'agit d'une reprise de "the boy with a thorn in his side" des Smiths.
L'arrivée de la voix ferait toutefois plutôt pencher pour Dick Rivers.
En réalité il s'agit de Mathias, un auteur-compositeur-interprète, plus connu (des auditeurs de bide et musique) pour son tube "pas un jour sans une ligne".

Mathias est un gars qui n'a pas peur.
Pas peur de dénoncer les dérives de ses contemporains.
Pas peur d'employer l'anglais pour étendre la portée du message.
Pas peur de commencer une chanson par des vers aussi bien troussés que
"Au seuil de deux-mille / je crois c'est normal /jette un oeil dans les vitrines / l'amour n'y est pas"
Pas peur non plus de parler des méchants à la troisième personne du pluriel et de s'adresser à ses "frères" auditeurs en employant la seconde, établissant clairement qu'il s'agit d'une chanson sur les vilains à l'attention des gentils.
Chez Mathias, on préfére l'assonance à la rime parce qu''assonance" sonne comme "élégance", tandis que "rime" sonne comme "frime".
Et de fait, dans cette chanson, tout le charme est dans le détail : la façon, par exemple, dont Mathias laisse glisser un minuscule "ouais" de dédain à la fin du vers "ils ont coupé les fruits verts".
On me reprochera peut-être d'avoir choisi une fois de plus une chanson à fort message politique. Mais je crois que certaines choses - en particulier en cette période pré-électorale - gagnent à être chantées haut et fort.
Après "les human beings", chacun je crois aura choisi son camp et son candidat.
D'autres objecteront que cette chanson ressemble fort à du Cock Robin chanté par Johnny.
Je concluerai en convenant qu'avec la puissance de son coffre et l'acuité de sa vision, c'est à Mathias et non au rocker belgo-suisse qu'aurait dû échoir le cri déchirant de la publicité "Optic 2000".

dimanche 18 février 2007

Jolie Gaulle #1 : La prescription de Ginette



Symétriquement à la rubrique "top navrance", je démarre une nouvelle série permettant de découvrir quelques pépites souvent méconnues ou carrément oubliées du patrimoine francophone et qui auraient pourtant bien mérité de passer à la postérité (voire dans les playlists de Nostalgie).
C'est Ginette Garcin qui ouvre les hostilités avec son irrésistible "cresoxipropanédiol en capsules" sur un texte de Jean Yanne, jerk pharmaceutique de haute volée qui pourra servir d'exercice de diction (et de mémoire) à tous ceux qui veulent faire de l'orthophonie en s'amusant.

jeudi 15 février 2007

Tous les Mario du monde




Le thème du jeu vidéo "Mario Bros." viendrait-il talonner les Beatles sur le terrain de l'universalité ?
C'est ce que cette hallucinante collection de vidéos pourrait nous laisser croire.
A ce train-là, mon prochain billet devrait traiter de sangliers qui imitent Roland Magdane en jean taille-basse ou du tournoi de ping-pong sous-marin de la Ligue des accordéonistes amputés des bras…

mercredi 14 février 2007

Nuggets de Poulet



On parle beaucoup de lui en ce moment à l'occasion de la sortie de son film "Substitute" ( au sujet du footballeur Vikash Dhorasoo, éternel remplaçant de l'équipe française ).
Mais Fred Poulet n'est pas qu'un cinéaste décalé.
Il est aussi, par exemple, technicien-lumière dans le spectacle vivant (souvent associé aux projets de Seb Martel et sa tribu).
Et puis, surtout, c'est un formidable auteur-compositeur-interprète.
Intrigué, dès 1995, par ce mec qui intitule son premier disque "mes plus grands succès", je suis entré avec bonheur dans l'univers un peu cafardeux d'un artiste grinçant mais attachant, pour ne plus jamais en sortir.
Le garçon affiche un goût prononcé pour le mot (jeux sonores, calembours, procédés de construction quasi oulipiens) et une désinvolture désarmante, souvent drôle.
De ce premier disque paru chez Saravah (l'illustre maison de Pierre Barouh ayant notamment accueilli la Brigitte Fontaine des jours fastes), je vous propose deux extraits : le spectaculaire "à l'italienne" reposant sur un usage systématique de l'anadiplose (le mot savant pour "marabout/bout d'ficelle/…") et un morceau nommé "souris" plus allitératif mais surtout plus émouvant. On a beaucoup évoqué Bashung pour décrire Poulet. Pourquoi pas ? Poulet est en tous cas bien moins sibyllin et glacial, plus décontracté et probablement beaucoup moins perfectionniste, ce qui à mon sens ne le rend que plus bouleversant.
Faussement arrogant (mais "l'aplomb donne du poids à la plume"), véritablement génial, l'oiseau a fait paraître quatre autres albums ("encore cédé", "dix ans de peinture", "hollywood, baby" et plus récemment "Milan athletic club") en une bonne dizaine d'années. Il a abandonné progressivement le côté blues bancal et les productions "à l'arrache"de ses débuts, optant pour un decorum un peu plus classe, volontiers jazzy, mais toujours un peu poisseux. Il n'a en revanche rien perdu de son insolent talent, comme vous pourrez le constater si vous faites l'acquisition de son dernier album ou si vous parvenez à assister à l'une de ses trop rares apparitions scèniques. Allez, je vous en offre une petite dernière, en espérant que ça achèvera de vous convaincre…
P.S. : pour les aficionados, Arte a mis en ligne une chouette vidéo d'"electric fish", tirée de l'émission "Klang". Délectable.

Top Navrance #2 : Soul Patriote



L'apparition, dans la deuxième moitié des années 90, du groupe néo-soul POETIC LOVER, fut, pour tous les fans français de Marvin Gaye ou de Barry White, une occasion de retrouver goût à la vie.
Enfin un groupe de jeunes (des banlieues en plus), doté de voix splendides et d'un vrai message positif : Stop à la sinistrose et vive le sexe !
Tout en imposant dans le lexique français un nouveau substantif, "le love" (qui signifie "mise à disposition gratuite, exclusive, et a priori librement consentie des organes génitaux d'une jeune personne" ), le puissant quatuor de Noisy-le-Sec, le temps de deux albums légendaires, donnait un nouveau souffle à une littérature courtoise en perte de vitesse.
Mais ce n'est pas tout.
Au beau milieu de leur premier opus - astucieusement intitulé "Amants poétiques"- nos quatre étalons ont livré une bouleversante version a capella de notre Hymne National, prêtant au ravissant poème de Rouget de Lisle une ferveur que seul un groupe de ce talent pouvait atteindre.
Bien plus forte que l'anecdotique relecture reggae de "la Marseillaise"par Gainsbourg, la version des Poetic Lovers invite à une profonde relecture du texte, plus sensuelle, plus imagée...
On imagine une jeune baby nymphe de la cité phocéenne, dont le corps de rêve se révèle au monde, bouleversé par la découverte de l'univers menstruel ("l'étendard sanglant", le"sang impur"), éveillant la lubricité des mâles voisins (les féroces soldats qui mugissent) qui brûlent d'envie d'avoir son love...
Entre désir et interdits.
Chacun filera à sa guise la métaphore suggérée par nos amis poètes, qui injectent du "love" là où d'aucuns ne percevaient que du "war".

Nota Bene : on dit bien "les Poetic Lover", de la même façon que Diam's "kiffe la vibes" avec son mec ou qu'Anis envisage un "road-movies à la Thelma et Louise". C'est le concept du "singuriel" (abolition du système singulier/pluriel), invention grammaticale traduisant le statut complexe de l'Artiste : à la fois unique et universel, solitaire mais en communion avec le public.

jeudi 8 février 2007

Vaguement Jumeau #2 : Jimmy contre Kevin

Je ne risque pas de faire découvrir à grand monde le célébrissime "Come on Eileen" des Dexys Midnight Runners, le morceau qui les fit connaître dans le monde entier en 1982, synthétisant le style de leur première période (la Northern Soul revue par un groupe de prolos anglais, pleins de ferveur mais un rien rigide) et le virage amorcé avec le deuxième album "Too-Rye-Aye" les voyant se tourner vers leurs origines celtiques à grand renfort de violon et de banjo.
En revanche, seuls les passionnés de Northern Soul reconnaitront ce single de Jimmy James paru en 1972 chez Stateside, intitulé "a man like you", qui donne largement autant envie de taper dans les mains (sur les temps pairs si ça vous fait rien).
Le refrain ne vous rappelle rien ?
L'emprunt est plus ou moins avoué, mais les droits d'auteur ont ét virés sur des comptes anglais.

mercredi 7 février 2007

Top Navrance #1 : Bleu profond

Il y a plus de deux ans, condamné chez moi à la suite d'un accident crétin, je lançais, dans l'espoir de me divertir intelligemment, le projet ambitieux d'une Anthologie de la Chanson Francophone Navrante.
Aidé par de nombreux proches dans un premier temps puis par quelques collaborations extérieures fort appréciées, je parvins, au bout de quelques mois (qui devinrent, inéluctablement, des années), à compiler ainsi chez moi une sélection comptant tout de même près de 300 chansons, retenues pour leur capacité à plonger l'auditeur dans un état de consternation, d'affliction ou, tout au moins, d'embarras.
J'ai décidé aujourd'hui que ce blog pourrait AUSSI servir à partager ces moments musicaux uniques. Je vous livrerai donc désormais, sur une base régulière mais au compte-goutte, les toutes meilleures pièces de mon Anthologie, dans le cadre de la rubrique "Top Navrance" que je vous propose donc d'inaugurer aujourd'hui.
Avant de démarrer, je tiens à remercier mes précieux collaborateurs : Flop, Burlot, CafardBleu, Mr Benjamin, Chris Gontard, Jean-Louis Maybe et l'ensemble du groupe La Division pour son soutien indéfectible.
Merci aussi à la radio Bide et musique, qui m'a mis sur de précieuses pistes et fait découvrir quelques joyaux.


On démarre par un classique :
"Pour l'amour d'un dauphin" par Daphnièle.
On est, certes, à la limite de l'Art Brut.
Difficile d'imaginer que cette chanson ait pu réellement être commercialisée.
Ou tout au moins achetée.
Et pourtant si.
En fait, il semble que cette Interprète de l'Irréel ait même commis deux autres singles (une reprise de Daniel Guichard + un cri d'amitié aux USA d'après le 11/09) et qu'elle ait même donné des concerts (je doute malheureusement qu'aucun survivant puisse en témoigner).
On l'aurait semble-t-il localisée du côté de Rouen (prudence en Normandie, donc).
En tous cas, voilà une oeuvre riche et envoûtante, écrite apparemment à l'occasion de la naissance d'un enfant, une célébration de la Vie et de son plus splendide messager : le Dauphin.
Et oui : parce que la vie, c'est l'eau.
Et l'eau, il y en a plein dans la mer.
Et qui c'est qui habite dans la mer ?
Bon, je vois qu'il faut tout vous expliquer.
Bref.
En tous cas, au delà de la mystique il y a la musique.
Et Dieu qu'elle est bonne…
Empruntant les sons de claviers préférés d'Eric Serra, en référence (subtile) à un film-culte du cinéma français sur le refrain imparable de sa chanson, Daphnièle n'hésite pas à y glisser aussi un clin d'oeil à la partition d'Angelo Badalamenti pour Twin Peaks en introduisant des nappes de synthétiseur inquiètantes dès le second couplet.
Jouant avec les mots comme le Dauphin avec le ballon, Daphnièle libère la métrique de ses règles éculées, parant le mot "endort" d'un puissant "e" final qui suggère le sommeil béat, ou soulignant, plus loin, le caractère sacré de l'existence en offrant trois syllabes au mot "vie".
Et puis il y a la voix. Une approche très personnelle de la mélodie, exploitant un système en quarts-de-tons typique des musiques savantes de l'Orient .
Toutefois, ce slow écologique, s'il regorge de trouvailles artistiques et semble porté par un authentique souffle poétique, ne répond pas à la question que me posait il y a quelques mois, un ami philosophe : "oui mais alors, le dauphin, s'il est si intelligent, pourquoi il passe ses journées à sauter dans un cerceau en couinant comme un con ?"

lundi 5 février 2007

Vaguement Jumeau #1 : Rosie contre Jenny

Inaugurons aujourd'hui une rubrique intitulée "Vaguement Jumeaux" dans laquelle je viendrai régulièrement vous faire écouter deux chansons présentant des similitudes plus ou moins avouées, troublantes, amusantes ou crétines. L'idée vise - là encore - à susciter des découvertes mais aussi à mettre en évidence des filiations, voire tendre des ponts entre des territoires parfois éloignés.
Je commence très sagement avec deux jolies chansons en provenance des USA.
Deux chansons plutôt tristounettes en fait, fortement teintées de nostalgie mais également lumineuses, comme porteuses d'un espoir réconfortant.
Je viens de découvrir la première. Il s'agit d'un extrait du nouvel album de Rosie Thomas, une chanteuse indie-folk déjà croisée aux côtés de Damien Jurado. Ce morceau s'intitule "much farther to go" et on y reconnait, aux harmonies vocales, le timbre suave de Sufjan Stevens, avec qui - d'après les ragots - la Rosie fricoterait.
En l'écoutant pour la première fois j'ai été frappé non seulement par sa beauté mais aussi par son étonnante proximité avec "keeping the weekend free", une chanson de Franklin Bruno interprétée par le groupe Liquorice sur son unique album paru en 1995.
Cette mélodie, ce texte, me hantent depuis de nombreuses années. "Je bloque mes weekends au cas où tu passerais..." Les histoires d'amoureux transis qui attendent trop longtemps, que le bonheur leur tombe dessus, je ne sais pas... ça me touche toujours un peu.
Je dois être comme Herbert Léonard : un grand sentimental.
Enfin, en tous cas les grilles d'accord sont assez proches (on peut s'amuser à chanter l'une sur la musique de l'autre, ou mieux : faire un mash-up), la mixité vocale utilisée à même escient, l'atmosphère également cotonneuse... Et vous, vous en pensez quoi ?

jeudi 1 février 2007

un musicien qui fait bouger ses mains sur un morceau de bois


On ricane, on ricane devant la dégaine d' Andy Mc Kee, et ce malgré son récent changement de look pour un style plus "skater islamiste".
Par contre, on rigole moins une fois qu'on l'a vu jouer.